L’Association d’Histoire des Sociétés Rurales œuvre à la promotion de la recherche sur les sociétés rurales en organisant des colloques, des rencontres et la publication de revues et ouvrages spécialisés. Afin de valoriser et soutenir les études historiques des mondes ruraux, l’Association organise un concours national de mémoires de Master d’histoire, qui récompense tous les deux ans des travaux d’une qualité exceptionnelle par un jury composé d’experts en histoire rurale.
Pour la troisième édition, le jury a délibéré le mercredi 6 janvier 2021 en visioconférence. Les 6 candidatures émanaient de 6 universités différentes (Bordeaux Montaigne, Chambéry Savoie Mont‑Blanc, Caen Normandie, Clermont Auvergne, Paul Valéry Montpellier, Toulouse Jean Jaurès). Le jury a souligné la qualité de l’ensemble des mémoires et remercie tous les candidats qui ont participé.
Le jury était composé de :
- Nicolas Carrier, professeur d’histoire médiévale à Lyon 3
- Alain‑Gilles Chaussat, docteur en histoire, responsable du service « Patrimoines & Musées » à la Communauté d’agglomération Mont Saint‑Michel‑Normandie
- Bruno Jaudon, docteur en histoire, professeur d’histoire-géographie dans l’académie de Montpellier
- Fabien Knittel, maître de conférences en histoire contemporaine à Besançon
- Stéphanie Lachaud, maîtresse de conférences en histoire moderne à Bordeaux Montaigne
- Edgar Leblanc, inspecteur général de l’agriculture
- Benoît Musset, maître de conférences en histoire moderne au Mans
- Sylvain Olivier, maître de conférences en histoire moderne à Nîmes
- Sylvain Skora, docteur en histoire, professeur d’histoire‑géographie dans l’académie de Rouen
La coordination du jury a été assurée par Stéphanie Lachaud, Corinne Marache, Jean‑Marc Moriceau et Blandine Parey.
Chaque membre du jury a examiné 3 mémoires pour étalonner son jugement, ce qui a donné quatre évaluations par candidat, pas forcément sur la période de spécialité des membres du jury, pour des regards complémentaires. La grille d’évaluation commune représente un second gage d’uniformisation. Tous les membres du jury ont accès à tous les mémoires pour consultation si nécessaire ou par intérêt particulier.
Une année d’adhésion pleine est offerte à chaque participant au prix.
Le premier prix a été attribué à Joséphine Moulier (Université Clermont Auvergne), pour son mémoire intitulé Peuplement et formes d’occupation du sol dans les Monts du Cantal à la fin du Moyen Âge (XIIIe‑début XVIe siècle). Histoire des communautés rurales en moyenne montagne. Elle bénéficie de 500 euros de chèque, 300 euros de bons d’achats dans HSR et la BHR ainsi que trois ans d’abonnement gratuit à HSR.
Joséphine Moulier a vu son travail sur les montagnes cantaliennes au Moyen-Âge unanimement classé en première position pour sa maîtrise des sources et de la documentation bibliographique, pour ses analyses fluides et pertinentes d’un grand intérêt pour l’histoire des sociétés rurales.
Résumé de la recherche : Ce travail de master avait pour but de mettre en lumière la vie des communautés rurales de la moyenne montagne cantalienne, zone quelque peu oubliée de la recherche historique et archéologique. Ce strato-volcan effondré forme un ensemble de vallées larges et ouvertes, séparées par des plateaux ou planèzes, qui rayonnent en étoiles à partir de sommets culminant jusqu’à 1800 m. Cet espace de montagne trouve une identité ancienne en tant que bailliage des Montagnes d’Auvergne. À partir d’une étude des documents d’archives, dont certains n’avaient jamais été exploités auparavant, mais aussi des découvertes archéologiques anciennes et récentes, Joséphine Moulier pu mettre en avant de nombreux aspects de la vie communautaire rurale. Dans un premier temps, elle s’est consacrée à l’étude des différents cadres de la vie collective et maillages qui structurent et territorialisent la vie rurale : religieux, seigneuriaux et villageois. Ses analyses se sont ainsi appuyées sur un ensemble d’une quinzaine de terriers et lièves, mais aussi des actes juridiques ou chartes, qui lui ont permis d’approcher quelques réalités du peuplement, de l’habitat et des structures familiales. Les communautés rurales sont apparues comme bien structurées, particulièrement actives et entretenant des rapports complexes et souvent conflictuels avec les pouvoirs féodaux et religieux. Cette approche de longue durée a permis de croiser les lectures historiques, archéologiques et ethnologiques. Enfin, la dernière partie est dévolue aux changements, ruptures et évolutions à l’œuvre à la fin du Moyen Âge en insistant sur les conséquences des crises du XIVe siècle qui ont très durement frappé cet espace de montagne, l’évolution du paysage, ainsi que sur le vaste mouvement de reconfiguration de l’occupation du sol du XIIIe siècle . Celui-ci fait émerger une économie d’estive que l’on pourrait qualifier de « pré-capitaliste », fondée sur l’exploitation des « montagnes » et sur la fabrication et exportation du fromage. Ce système fait la part belle aux troupeaux étrangers et aux locations ou achats massifs de terres par des communautés religieuses, entrepreneurs extérieurs ou seigneurs locaux et ce, aux dépens mais aussi parfois au profit des communautés locales.
Le deuxième prix a été attribué à Christelle Boisbineuf (Université Bordeaux Montaigne), pour son mémoire intitulé Le jardin paysan du Sud-Ouest, du début du XIXe siècle aux années 1960 : acteurs et pratiques. L’exemple du jardin périgourdin. Elle bénéficie de 200 euros de chèque, 200 euros de bons d’achats dans HSR et la BHR ainsi que deux ans d’abonnement gratuit à HSR.
Christelle Boisbineuf a proposé une histoire des jardins paysans sur le temps long de 1800 à 1960 à partir de l’exemple du Périgord : sujet original, enquêtes archivistiques et méthodes variées ont séduit le jury.
Résumé de la recherche : Depuis la fin des années 1990, le jardin potager connaît un renouveau dans les sociétés occidentales, pourtant, il s’avère que l’histoire du jardin nourricier est encore largement méconnue. Bien qu’omniprésent dans une société très largement paysanne jusqu’au milieu du XXe siècle, il a été négligé des historiens faute de sources évidentes. Une fois cet obstacle levé, s’offre un sujet de recherche capable de renouveler le regard porté sur les sociétés rurales. Ainsi, à partir d’un corpus diversifié – sources administratives, notariées, judiciaires, fiscales, bulletins divers, manuels scolaires ou de jardinage, carnets de recettes, catalogues, iconographie, ou encore sources muséographiques et enquêtes orales –, il a été possible de mener une étude régionale centrée sur le département de la Dordogne. En analysant les pratiques, le jardin est riche d’enseignements sur les manières dont les paysans s’accommodent de la faune, la flore, le sol et le climat, pour couvrir leurs besoins alimentaires. Souvent considéré comme un espace domestique, il est également un lieu où s’expriment les goûts personnels, l’intimité, les croyances, le rapport au corps et aux autres. Même s’il est évident que le jardin est nécessaire au quotidien de la famille rurale jusqu’à l’après-guerre, ce marqueur sensible nous permet d’aborder finement les évolutions profondes qui affectent les sociétés rurales. Si les permanences se perpétuent à travers des traditions essentiellement familiales, il est indéniable que le jardin s’ouvre progressivement aux influences extérieures. Aussi, même si les partisans du progrès agricole – comices, sociétés savantes, coopératives – appuyés par un enseignement dirigé vers les enfants de paysans, sont des acteurs évidents de cette acculturation, le rôle des imprimés ou des migrations de populations rurales méritent également d’être soulignés. Enfin, l’existence même de surplus dans la production nous amène, de fait, à envisager les échanges qu’il génère. Ainsi, le don, le troc, la commercialisation ou encore le vol, sont autant de mode de consommation influençant les pratiques des jardiniers et participent à inscrire les campagnes dans des circuits d’échanges multiscalaires. Même si de nombreux aspects de cette étude sont généralisables à l’ensemble de la France et de l’Europe occidentale, elle montre que les jardins paysans, du Sud-Ouest de la France doivent leur persistance à un environnement favorable dans un système de polyculture élevage qui offre une grande capacité d’adaptation et d’intégration.
Trois candidats ont obtenu le troisième prix ex-aequo. Ils ont bénéficient, chacun, de 100 euros de bons d’achats dans HSR et la BHR ainsi qu’un an d’abonnement gratuit à HSR.
Bertrand Mathurin, Loup Guesnon et Xénie Nouvel ont tous les trois été classés ex‑aequo pour le troisième prix, en raison du caractère inédit d’un travail sur la lagune de Palavas et malgré une expression écrite à améliorer pour Bertrand Mathurin, en raison de sa démarche de reconstitution des familles et d’un environnement économique et social de l’artisanat du cuivre normand pour Loup Guesnon et en raison d’une compréhension fine et d’une analyse poussée d’une seigneurie locale pour Xénie Nouvel.
Mathurin Bertrand (Université Paul Valéry Montpellier) : La guerre des Maniguières. Histoire sociale et environnementale de la lagune palavasienne au XVIIIe siècle
Résumé de la recherche : Dans la lagune de Palavas (actuel département de l’Hérault), écosystème instable entre terre et mer, subissant les tempêtes, les marées et les crues des bassins versants, on trouve encore au XVIIIe siècle d’étranges constructions de bois de tamaris et de roseaux, sortes de barrages en forme d’accordéon qui traversent et divisent les étangs en plusieurs enclos. Ce sont les maniguières, des pêcheries fixes adaptées à l’environnement si particulier de la lagune palavasienne, dont on retrouve la trace jusqu’au Bas Moyen Âge. Ce travail tente de reconstituer le monde économique et social qui régit l’exploitation coûteuse de ces constructions : bourgeois et nobles provinciaux investissant dans cette économie de rente particulièrement stable mais peu intensive ; différentes dynasties de poissonniers montpelliérains qui défendent leurs monopoles sur l’approvisionnement et la vente du poisson ; mais également les populations riveraines des étangs et les pêcheurs embarqués qui luttent contre cette privatisation progressive d’un espace riche en ressources diverses. Ces différents acteurs luttent pour défendre leurs intérêts, dans un espace économique tendu par de forts rapports de domination. Ce travail ne se contente pas de décrire ce système économique et social si particulier : des problématiques très diverses et complexes se dégagent très rapidement de l’analyse du monde des maniguières. En effet, la lagune palavasienne est, au XVIIIe siècle, dans une phase intensive de confinement : les graus se ferment, le renouvellement de l’eau se fait plus rare et le fond de l’étang se rehausse fortement, phénomène environnemental hérité de dynamiques géomorphologiques millénaires. Cette lagune riche en ressources tant minérales, qu’animales et végétales, lieu de vie de nombreuses espèces animales et de sociétés humaines, se transforme très rapidement, jusqu’à bouleverser complètement l’anthroposystème, système écologique et social, qu’elle abrite. C’est dans ce contexte que l’État Royal intervient, en pleine dynamique économique mercantiliste : la lagune palavasienne est un axe privilégié du commerce entre le récent canal du Midi et le Rhône. La construction du canal du Rhône à Sète commence au début du siècle, afin de maintenir la navigation commerciale sur les étangs. Cette construction nécessite la destruction de nombreuses maniguières qui bloquent le passage aux navires. Les états du Languedoc, chargés de la construction du canal, entrent très vite en conflit direct avec les propriétaires des pêcheries, avec pour intermédiaire l’intendant du Roi. Ces conflits économiques et environnementaux aboutissent en 1739 à la controverse des maniguières entre le syndic des états de Languedoc et le représentant des propriétaires, l’évêque de Montpellier. Cette controverse, à l’origine de ce travail, soulève de nombreuses interrogations environnementales : sur la nature des étangs, les droits de propriété d’une lagune relevant du domaine public, la question des communs sur les rives de la lagune, et la priorisation d’un usage commercial de l’espace lagunaire sur les autres usages économiques dont dépendent les locaux. La « Guerre des Maniguières » ne s’arrête donc pas à l’étude des rapports de domination entre les différents acteurs des pêcheries. Elle interroge des problématiques très actuelles, écologiques et environnementales, politiques et économiques. Ce travail tente de faire son histoire, l’histoire de la transformation d’un anthroposystème, du passage d’un régime féodal des communs à un régime de consolidation de la propriété privée face à l’appropriation des eaux par l’État. L’histoire des maniguières est au carrefour d’une histoire technique, économique et sociale, scientifique, juridique et politique. Ce travail tente d’en donner une interprétation argumentée, s’appuyant sur des archives tirées de fonds très différents, publics et privés ; il s’accompagne d’annexes et d’outils graphiques à visée pédagogique afin de faciliter au lecteur la compréhension de ce système inscrit dans son territoire et son temps ; enfin, cette recherche propose différents axes d’analyse d’un anthroposystème et mobilise des disciplines diverses, allant de l’anthropologie à l’hydrodynamique en passant par la biologie et l’histoire bien sûr, afin que l’interprétation proposée ici puisse être comparée à l’étude d’autres modèles sociaux et environnementaux dans le monde et le temps. Ce mémoire est donc l’histoire sociale et environnementale de la mutation d’un système unique et complexe.
Loup Guesnon (Université Caen Normandie) : Au cœur du monde du cuivre : stratégies et modèles des marchands‑artisans de Villedieu (XVe‑XVIIIe siècle)
Résumé de la recherche : Entrés dans les ateliers du XVIIIe siècle à la suite d’un périple qui a mené Loup Guesnon de l’histoire humaine du cuivre aux chemins de Villedieu en master 1 ; après avoir replacé Villedieu dans sa position de carrefour terrestre et étudié le travail du cuivre sous ses différentes formes, dans les cours, maisons et ateliers du bourg, l’auteur a proposé dans ce master 2 de sortir de la production pour rencontrer ces hommes, ces femmes et ces familles qui vivent de ce métal, en particulier à travers la figure du marchand bourgeois artisan du cuivre de Villedieu. Pour replacer le travail du cuivre au cœur et parmi les préoccupations de ces populations, il a étudié leurs stratégies familiales et individuelles. La famille se révèle être un pilier, une structure à la base même de la cellule économique primaire du foyer et des phénomènes de transmissions. Cette cellule économique se meut, naît, croît et meurt attachée à l’activité principale du travail du cuivre. Mais le groupe élitaire des marchands‑artisans évolue dans un mouvement économique tripartite comprenant le cuivre, la terre et le crédit. En réalité, replacer le cuivre à sa place parmi ces éléments revient à interroger le modèle poursuivi par les travailleurs du cuivre de Villedieu, petits et grands. Enfin, dans cette économie tripartite, le travail est un élément central, dont le marchand-artisan tire profit par le commerce. L’étude du commerce permet de comprendre la concentration de travailleurs d’un même secteur d’activité à Villedieu, mais aussi d’entrevoir les enjeux à l’entrée et à la sortie de la production de l’objet, sur les routes du royaume, du XVe au XVIIIe siècle, chez les fournisseurs et clients des marchands-artisans de Villedieu.
Xénie Nouvel (Université Toulouse Jean Jaurès) : La seigneurie de Pointis-Inard au XVIIIe siècle
Résumé de la recherche : La seigneurie moderne a fait l’objet d’un nombre important de travaux historiques ayant enrichi notre connaissance du régime, notamment en histoire rurale. Les enjeux historiographiques autour de cet objet ont cependant produit un portrait assez sombre de l’institution. Depuis les années 2000, quelques historiens et historiennes invitent alors à un renouvellement des problématiques. Empruntant à la micro-histoire certaines de ses méthodes, la recherche de Xénie Nouvel s’inscrit dans cette perspective et s’attache à étudier la seigneurie de Pointis-Inard, située dans les Pyrénées centrales, en tant que cadre de la vie rurale au XVIIIe siècle. Elle s’intéresse plus particulièrement au rôle et à la participation des seigneurs dans la production agricole inardaise. S’appuyant sur des sources cadastrales, des actes notariés, une partie de la comptabilité et de la correspondance privées seigneuriales, ce questionnement conduit à restituer l’ancrage territorial et l’architecture de la seigneurie inardaise puis les choix de gestion opérés par les seigneurs dans le domaine agricole. À travers des éléments de leur vie matérielle et culturelle, l’analyse du quotidien seigneurial complète cette approche et éclaire les orientations agraires déployées ainsi que leur place au sein de la communauté villageoise. Il apparaît alors que les seigneurs veillent avec un soin particulier à la mise en valeur de leurs terres et de leurs infrastructures agricoles, indépendamment du mode de faire-valoir employé. Ils choisissent des semences spécifiques, déterminent les types et le nombre d’animaux élevés, en lien d’ailleurs avec le haras seigneurial, et fournissent des outils à leurs exploitants. Les moulins font quant à eux l’objet d’un suivi attentif : les exigences seigneuriales en matière d’entretien et de réparations démontrent toute l’importance qu’ils revêtent dans la production locale. De même, les seigneurs développent des stratégies foncières afin d’augmenter leur patrimoine, mais aussi de procéder à un regroupement de leurs parcelles agricoles. Si leurs démarches découlent d’intérêts particuliers, elles révèlent en outre une volonté d’inscrire leur gestion dans de nouvelles pratiques agraires issues des avancées agronomiques du siècle ; voire de fournir des prestations de services utiles à l’économie locale. La seigneurie semble ainsi jouer un rôle d’encadrement et de stimulation de la vie agraire. À la veille de 1789, sa place au sein des campagnes et les fonctions qu’elle endosse auprès des tenanciers et des habitants demandent par conséquent à être réévaluées.
Un accessit a été attribué à Constance Toppin (Université Savoie Mont‑Blanc). : Disputer les communs en montagne à la fin du Moyen Âge. L’exemple des conflits entre les communautés tarines de Landry et Peisey Elle bénéficie d’un an d’abonnement gratuit à HSR.
Constance Toppin a proposé un mémoire très intéressant et sérieux, doublé d’un travail de classement de fonds d’archives, mais les travaux à évaluer étaient d’une telle qualité que ce mémoire n’a pas été primé mais le jury a tenu à en saluer la qualité en lui accordant un accessit.
Résumé de la recherche : Les habitants des montagnes de Savoie disposent, sans doute bien avant que ne l’attestent les premières sources écrites, de zones d’exploitation partagées, les « biens communs ». Ces derniers, tant eaux, forêts ou alpages partagés entre membres d’un consortage ou d’une communauté, complètent les apports de l’agriculture vivrière des paysans montagnards grâce aux bois ramassés ou aux herbes broutées par les troupeaux montés à l’estive pendant l’été. Les actes juridiques parvenus jusqu’à nous mettent en lumière les tensions entre communautés, parfois très virulentes, pour défendre ou faire entendre leurs droits. Ramener la paix, voilà la mission de personnages extérieurs aux groupes en conflit, les arbitres et médiateurs, nommés pour trouver et imposer le compromis, avec l’aide des représentants de chacune des communautés et l’assistance juridique des notaires. Certains de ces documents se présentent comme de véritables règlements d’usages qui nous renseignent sur la gestion d’une exploitation des communs que nous pourrions qualifier de « raisonnée ». Ces règles collectives et le respect du droit s’imposent pour le bien de tous non pas sous l’impulsion d’une conscience écologique précoce mais plutôt par l’impérieuse nécessité de préserver des ressources indispensables sur le court et le long terme. Cette étude se propose d’étudier le cas de deux communautés voisines, celles de Landry et Peisey, confrontées comme tant d’autres à la difficile et conflictuelle utilisation de ressources et espaces communautaires. Cette enquête, bâtie sur un exemple à l’échelle certes limitée, veut essayer de mieux comprendre les usages qu’en font les montagnards de la fin du Moyen Âge et de mettre en évidence les moyens juridiques destinés à préserver les droits individuels et collectifs s’appliquant sur les communs, aujourd’hui bien plus fréquentés par les randonneurs que par les troupeaux des communautés.